Je suis libre à jamais

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Les plumes improvisent un texte
avec pour seule consigne
l'excipit "Je suis libre à jamais".

 

Envol

D’abord grande chenille multicolore, son corps s’était transformé en chrysalide bien fermée pendant des jours interminables. Prisonnier de lui-même, il désespérait ignorant tout du sort qui se jouait.

Et si la chrysalide se détachait du roseau et tombait à l’eau ? Et si elle se desséchait prématurément ? Et si un prédateur la croquait ?!

Mais un jour, à la fin du printemps, l’enveloppe contraignante s’ouvrit. De belles ailes aux couleurs irisées ornaient maintenant son dos de papillon sous le soleil complice ; elles seraient bientôt sèches et il prendrait son envol du bord de la rivière vers la clairière fleurie, puis vers le ciel, au plus haut possible, se disant : maintenant je suis libre à jamais…

Danielle.

Rédemption

Ça fait aujourd’hui quatre longues années que je suis enfermé dans cette prison. Et je n’ai même pas fait la moitié de ma peine. Quatre années à flipper, à essuyer des coups, à avoir le ventre noué toute la journée par peur de me faire serrer dans un coin et qu’une lame me transperce le corps.

C’est vrai, je suis un horrible criminel, j’ai tué, rien à ajouter.

Bien sûr, on a évoqué mon enfance difficile dans les foyers d’accueil qui n’ont d’accueil que le nom mais la sentence est tombée, j’en ai pris pour dix ans.

Et puis Tonio est arrivé, mon nouveau co-détenu. Il m’a appris à lire, à écrire. Je me suis inscris à des cours et j’ai même réussi certains examens. Désormais j’écris tous les jours, dès que j’ai le temps et j’oublie tout. J’oublie mon triste passé, j’invente de belles histoires et elles me délivrent de tout ce mal qui tournoyait dans ma tête.

Maintenant je me sens libre. Je suis libre à jamais.

Isabelle.

Libre

J’ai eu du mal à m’en sortir, mais enfin me voici dehors ! Enfin à l’extérieur de cet endroit exigu où je me trouvais enfermé. Mais ce dehors est à peine plus spacieux, et surtout, je ne suis pas tout seul, y en a deux autres avec moi et ils en prennent de la place ! Et à l’heure des repas il faut se précipiter pour avoir sa part, et ça, plusieurs fois par jour. Quant à l’hygiène, c’est très relatif ! Enfin, c’est chauffé, il ne faut pas se plaindre trop.

Je compte les jours, c’est vraiment long ! Pas de distractions, et ces deux autres-là, je n’arrive plus à les supporter !

Et voilà qu’un beau jour je découvre que les deux autres ne sont plus là, plus de repas non plus d’ailleurs, plus rien ! Je ne peux pas rester ici. Je me penche un peu vers l’autre dehors que je ne connais pas. Ça va pas être facile de sortir d’ici, mais je sais pourtant que je dois quitter les lieux au plus vite sans savoir ce qui va m’arriver. Je me penche encore un petit peu, il est bien trop haut ce dehors, je me risque sur plan incliné très inégal et dangereux. Bon sang, c’est vraiment haut et ce dehors est tellement grand ! Et en plus il y a du vent, ça chatouille un peu. Mais soudain j’aperçois les autres là-bas, pas croyable ! Ils me disent de me lâcher, il faut sauter dans le vide, sur le vent, il paraît que ce n’est pas difficile, que j’en suis capable.

Allez ! On y va. Un, deux, trois, ça y est, je vole !!!  Je suis libre à jamais.

Annie.

Évasion

Des heures pleines et entières. Des jours et des nuits. Les yeux clos puis grand ouverts. Le crayon régulièrement taillé. Pas de gomme. Quelques ratures. La mine qui trace des chemins infinis de mots. Le silence à peine troublé par le papier ainsi recouvert. Des époques traversées. Des personnages inventés ou ressuscités. Des lieux imaginaires ou revisités. La frénésie de l'écriture. La peur que l'inspiration se tarisse. Au moindre doute replonger au cœur de soi, de sa mémoire, de ses rêves.

Depuis que l'administration pénitentiaire a décidé de fournir aux détenus de quoi écrire, je purge ma peine et mon chagrin dans les mots grâce auxquels je suis libre à jamais.

Sylvain.

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